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Jeûne mortel au Kenya: les premiers corps rendus aux familles

Kenya | March 26, 2024, Tuesday @ 14:10 in En français » MONDE | By: AFP | Views: 1406
Jeûne mortel au Kenya: les premiers corps rendus aux familles

Des trous creusés sont visibles après l'exhumation des corps sur le site de la fosse commune de Shakahola, à l'extérieur de la ville côtière de Malindi, le 25 avril 2023. (Photo Yasuyoshi Chiba / AFP)

(AFP) - Les premiers corps d'adeptes d'une secte évangélique au Kenya, dont le pasteur prêchait de jeûner jusqu'à la mort, ont été rendus mardi aux familles, près d'un an après la découverte des premières victimes.

Un total de 429 corps ont été retrouvés depuis le début des fouilles en avril 2023 dans la forêt de Shakahola (sud-est), près de la ville de Malindi, où le pasteur autoproclamé Paul Nthenge Mackenzie prônait de jeûner jusqu'à la mort pour "rencontrer Jésus" avant la fin du monde qu'il annonçait pour août 2023.

Il aura fallu près d'un an pour identifier les corps grâce à l'ADN.

Une famille en pleurs a reçu quatre corps, qui ont été chargés dans un corbillard à Malindi, a constaté un journaliste de l'AFP.

Chauffeur de taxi avant de se proclamer pasteur, Paul Nthenge Mackenzie est en détention depuis le 14 avril, au lendemain de la découverte des premières victimes dans la forêt de Shakahola où se réunissait son "Eglise internationale de Bonne nouvelle".

Les recherches menées dans cette vaste zone de "bush" de la côte kényane ont depuis permis de découvrir 429 corps dans des tombes ou fosses communes, des décès qui se sont étalés sur plusieurs années.

Les autopsies ont révélé que la majorité des victimes sont mortes de faim. Mais certaines victimes, dont des enfants, ont été étranglées, battues ou étouffées.

Les familles des victimes ont dû attendre presque un an, en raison notamment des retards dans les profilages ADN faute de réactifs et d'équipement.

Au moins 35 autres charniers ont été identifiés et de nouvelles exhumations qui devraient bientôt commencer pourraient alourdir le bilan.

 

- "Défaillances" -

 

La Commission nationale des droits de l'homme du Kenya (KNCHR), un organisme officiel mais indépendant, a déploré la semaine dernière la lenteur du processus d'identification des corps.

"Cela retarde non seulement la justice, mais viole également leurs droits culturels en vertu de l'article 44 de la Constitution d'enterrer leurs proches d'une manière culturellement acceptable et digne", a déclaré la KNCHR dans un rapport. "Les gens (...) ont besoin de mettre un terme à cette affaire".

Mais le chef des opérations médico-légales, Johansen Oduor, a déclaré la semaine dernière que la plupart des familles ne sont pas venues réclamer les corps, rendant plus difficile l'obtention d'échantillons d'ADN.

Paul Nthenge Mackenzie, en détention depuis le 14 avril 2023, est notamment poursuivi pour "terrorisme", "torture" et "cruauté" sur enfants.

La révélation de ce scandale, baptisé "massacre de Shakahola", a placé les autorités kényanes sous le feu des critiques pour ne pas avoir empêché les agissements du pasteur, pourtant arrêté à plusieurs reprises pour ses prêches extrêmes.

Dans un rapport publié en octobre, une commission sénatoriale a pointé des "défaillances" de la justice et de la police, alertées en 2017 et 2019.

En juillet, le ministre de l'Intérieur Kithure Kindiki a estimé que "le massacre de Shakahola (était) la pire faille de sécurité de l'histoire" du Kenya, promettant de "faire pression sans relâche pour des réformes légales afin de dompter les prédicateurs voyous".

L'affaire a ravivé le débat sur l'encadrement des cultes au Kenya.

Le président William Ruto, lui-même un fervent protestant soutenu par les milieux évangéliques lors de son élection en août 2022, a créé un groupe de travail chargé de "l'examen du cadre légal et réglementaire régissant les organisations religieuses".

Mais les précédentes tentatives de réglementation se sont heurtées à une vive opposition, au nom notamment de la liberté de culte.

Le gouvernement a annoncé que la forêt de Shakahola serait transformée en "lieu de mémoire", "afin que les Kényans et le monde n'oublient pas ce qui s'est passé".

ho-dyg/blb

© Agence France-Presse

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