Le navire humanitaire Ocean Viking et ses 230 migrants ont accosté en France
Le navire de sauvetage " Ocean viking " de l'organisation maritime-humanitaire européenne " SOS Méditerranée ", escorté par un bateau militaire, arrive à Toulon, dans le sud de la France, avec des migrants à bord, le 11 novembre 2022. (Photo by CHRISTOPHE SIMON / AFP)
(Seychelles News Agency) - La fin d'un "calvaire": Le navire humanitaire Ocean Viking a accosté vendredi au port militaire de Toulon (sud de la France) et les 230 migrants rescapés ont commencé à débarquer, une première en France qui suscite tensions avec l'Italie et débats sur l'immigration.
"Le navire a accosté vers 08H50 et les personnes ont commencé débarquer", a indiqué le préfet Evence Richard lors d'une conférence de presse, insistant sur un accueil pensé "dans un souci de dignité et d'humanité".
"Il y a beaucoup d'émotion à bord, tout le monde est très très fatigué mais soulagé d'arriver à terre, c'est la fin d'un calvaire", a déclaré à l'AFP Laurence Bondard, pour l'ONG SOS Méditerranée qui affrète le navire.
L'Ocean Viking a erré en mer trois semaines après avoir secouru, au large de la Libye, des hommes, femmes et 57 enfants, originaires pour certains de pays en guerre.
L'Italie, où le nouveau gouvernement d'extrême droite a durci son discours contre les migrants, lui a refusé l'accès à ses ports, générant une crise diplomatique avec la France qui a décidé de l'accueillir "exceptionnellement".
Vendredi, ces personnes seront transférées vers un centre de vacances sur la presqu'île de Giens à Hyères, une commune à une vingtaine de kilomètres à l'est de Toulon, déclaré "zone d'attente internationale" pour une vingtaine de jours.
- Zone d'attente -
Les rescapés "ne pourront pas sortir du centre administratif où on va les mettre et ne seront donc pas techniquement sur le sol français", avait indiqué le ministre de l'Intérieur français Gérald Darmanin.
D'importantes forces de l'ordre étaient déployées à proximité du centre d'hébergement, a constaté un photographe de l'AFP et la presse n'a pas accès au port de débarquement.
Au total le débarquement mobilise 600 membres des forces de l'ordre et la Croix-Rouge est chargée du dispositif humanitaire.
Toutes ces personnes feront l'objet d'un suivi sanitaire, puis de contrôles de sécurité des services de renseignement, avant d'être entendues par l'Office français de protection des réfugiés (Ofpra), qui attribue le statut de réfugié. L'Ofpra pourra réaliser jusqu'à 90 entretiens par jour dès samedi.
La procédure qui sera appliquée aux quatre migrants évacués en Corse jeudi en raison de la situation médicale de trois d'entre eux n'a pas été dévoilée.
Deux-tiers des personnes quitteront la France, puisqu'elles seront relocalisées dans neuf pays, a précisé le ministère, citant l'Allemagne qui doit en accueillir environ 80, le Luxembourg, la Bulgarie, la Roumanie, la Croatie, la Lituanie, Malte, le Portugal et l'Irlande.
- Expulsions directes ? -
En pleine présentation d'un projet de loi sur l'immigration en France, qui prévoit de réformer les procédures d'asile pour parvenir à expulser davantage, l'entourage de Gérald Darmanin a précisé que "ceux qui ne reçoivent pas l'asile seront éloignés directement depuis la zone d'attente vers leur pays d'origine".
Des contacts ont déjà été pris avec les pays d'origine en vue de possibles expulsions, a indiqué Eric Jalon, directeur général des étrangers en France.
"La possibilité d'expulser, c'est le principe de la zone d'attente. Mais pour des personnes qui viennent d'arriver, qui sont rescapées d'une traversée de la Méditerranée, qui ont failli se noyer, qui ont erré plusieurs jours en mer (...), ça pose la question de savoir s'ils vont pouvoir livrer immédiatement un récit et un état des persécutions qu'ils encourent dans de bonnes conditions", s'est inquiétée auprès de l'AFP Laure Palun, qui dirige l'Anafé (association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers).
Leur arrivée en France crispe particulièrement à l'extrême droite qui a crié au "laxisme" par la voix de la cheffe de file du Rassemblement national Marine Le Pen. Eric Zemmour, à la tête d'un parti d'extrême droite minoritaire, prévoit lui une conférence de presse vendredi après-midi.
La gauche et les écologistes ont eux salué une "décision digne des valeurs" de la France.
Le bras de fer autour de l'Ocean Viking a ravivé des tensions entre Rome et Paris sur l'accueil des migrants.
Dénonçant une Italie "très inhumaine", Gerald Darmanin avait annoncé jeudi la suspension "à effet immédiat" de l'accueil prévu de 3.500 migrants actuellement en Italie et promis de tirer "les conséquences" sur les autres aspects de sa "relation bilatérale".
"La réaction de la France face à la requête d'accueillir 234 migrants, quand l'Italie en a accueilli 90.000 seulement cette année, est totalement incompréhensible", a rétorqué le ministre italien de l'Intérieur Matteo Piantedosi.
Depuis juin, un système de relocalisation, qui avait déjà connu un premier volet en 2019, prévoit qu'une douzaine d'Etats membres, dont la France, accueillent de manière volontaire 8.000 migrants arrivés dans des pays dits de "première ligne" comme l'Italie.
Cependant, seuls 117 ont été relocalisés en vertu du mécanisme adopté en juin. Un nombre insuffisant, juge l'Italie.
Depuis le début de l'année, 1.891 migrants ont disparu en Méditerranée, en tentant de rejoindre l'Europe, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
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