Yémen: pire crise humanitaire dans le monde
D'après le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), plus de 3,6 millions de personnes auraient déjà été forcées de fuir leur foyer depuis 2015. MOHAMMED HUWAIS / AFP
(AFP) - Le Yémen, pays le plus pauvre de la péninsule arabique, est meurtri par six ans d'une guerre qui a provoqué, selon l'ONU, la pire crise humanitaire en cours dans le monde.
Le conflit oppose le gouvernement, appuyé depuis 2015 par une coalition militaire menée par l'Arabie saoudite, aux rebelles Houthis, soutenus par l'Iran, qui contrôlent de vastes régions du Nord et de l'Ouest ainsi que la capitale Sanaa après une offensive en 2014.
- Civils en première ligne -
Depuis six ans, le conflit a tué des dizaines de milliers de personnes, essentiellement des civils, selon des organisations humanitaires.
D'après le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), plus de 3,6 millions de personnes auraient déjà été forcées de fuir leur foyer depuis 2015.
Quelque 4,5 millions de personnes handicapées subissent "négligence et abandon" face à des difficultés accrues, selon Amnesty International (décembre 2019).
L'ONG évoque notamment des "déplacements difficiles", voire même des "abandons et des séparations" de leurs familles "dans le chaos qui accompagne la fuite".
- "Effondrement" du système de santé -
Le système de santé déjà déliquescent a été anéanti par le conflit.
Fin mai, plusieurs responsables onusiens ont réclamé un soutien urgent au Yémen où la situation est de plus en plus alarmante face à la progression de la pandémie de coronavirus.
"Le Covid-19 se propage rapidement" et "il est probable que la majorité des régions du pays soient déjà touchées si ce n'est pas toutes", estime l'ONU.
Selon l'ONG Save the Children, le pays "est sous-équipé face au virus, avec seulement la moitié des établissements de santé encore opérationnels".
Médecins sans frontières (MSF) a de son côté exhorté l'ONU et les pays donateurs à se mobiliser face à la "catastrophe" en cours.
Pour MSF, qui déplorait dès janvier l'"effondrement" du système de santé, les Yéménites "n'ont pas accès à l'eau potable, certains n'ont pas accès au savon".
Le pays a aussi été gravement affecté par le choléra qui a tué plus de 2.500 personnes depuis avril 2017. Environ 1,2 million de cas suspects ont été rapportés, selon l'OMS.
- Génération perdue -
Le conflit a dévasté le système éducatif déjà fragile, selon l'Unicef. "Les enfants non scolarisés sont exposés à des risques de toutes sortes, notamment ceux d'être contraints de participer aux combats, d'être forcés de travailler ou obligés de contracter des mariages précoces".
Avant la pandémie, deux millions d'enfants étaient privés d'école. Avec le Covid-19, cinq millions d'enfants supplémentaires vont la quitter, a précisé fin mai l'Unicef.
Plus de 12 millions d'enfants à travers le pays ont besoin d'une aide humanitaire.
Selon Cluster Santé, qui regroupe des ONG internationales et des agences de l'ONU, près de 1,2 million d'enfants sont tombés malades du choléra, de la diphtérie ou de la dengue au cours des trois dernières années.
- Une "paupérisation massive" -
Pour les Nations unies, le pays traverse la "pire crise humanitaire au monde": 24 millions de personnes, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d'une assistance humanitaire.
"C'est un contexte de désastre pour l'ensemble du pays", une "paupérisation massive", constatait en janvier MSF.
- "Crimes de guerre" -
La coalition militaire a été accusée de multiples "bavures" contre des civils. Elle a reconnu des "erreurs", mais accuse les rebelles Houthis d'utiliser les civils comme boucliers humains.
En septembre 2019, un groupe d'experts, créé par le Conseil des droits de l'Homme, a dénoncé la "multitude de crimes de guerre" commis par les diverses parties.
Attaques et tirs aériens visant de manière aveugle les populations civiles, utilisation de la famine comme arme de guerre, torture, viols, détentions arbitraires, disparitions forcées, recrutement d'enfants de moins de 15 ans...
"Personne n'a les mains propres dans ce conflit", assénait l'un des experts de l'ONU.
En février, la coalition a annoncé le début de poursuites judiciaires contre ses militaires soupçonnés de bavures lors d'attaques.
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