Optimiser la valeur ajoutée issue de l'économie bleue : un entrepreneur des Seychelles transforme les " prises accessoires indésirables " en produits d'exportation
James Lesperance de la compagnie Amirante Fisheries a trouvé un bon moyen de garantir que les prises accessoires provenant de l'industrie de conserve de thon ne soient pas gaspillées, en produisant une variété de différents produits transformés, tant pour la consommation locale que pour l'exportation. (Patrick Joubert, Seychelles News Agency)
(Seychelles News Agency) - Le port de Victoria, port principal de la capitale des Seychelles, archipel de 115 îles de l'océan Indien, est l'un des ports de pêche les plus achalandés en thon dans le monde. Chaque année, en moyenne, près de 200 000 tonnes métriques de poissons sont débarquées et transbordées.
Selon l’Autorité de pêche des Seychelles, la pêche représente un revenu de 370 millions de US$ annuel dans l'économie des Seychelles.
Un bon pourcentage du thon pêché par les senneurs étrangers dans la zone économique exclusive des Seychelles (ZEE) et débarqué au port de Victoria est destiné à la seule usine de conserve de thonde la nation insulaire.
La compagnie de thon de l'océan Indien Ltd, qui est l'une des plus grandes conserveries de thon dans la région, emploie 2300 personnes et produit jusqu'à 1,5 million de boîtes de thon par jour pour les grandes marques européennes telles que John West et Petit Navire.
Néanmoins, parmi les poissons capturés par les thoniersdans la zone, il y a toujours une proportion d'espèces de poissons indésirables connue sous le nom de «prises accessoires».
Un chargement de thon au port de Victoria aux Seychelles. (Autorité de pêche des Seychelles) Licence photo : CC-BY |
Dans le but d’augmenter la valeur ajoutée et les perspectives de croissance, tout en réduisant le gaspillage, une entreprise appartenant à un Seychellois a trouvé le moyen de s’assurer que les prises accessoiresdes senneurs étrangers, pêchant dans la zone économique exclusive des Seychelles soient utilisées à bon escient.
Depuis mars de cette année, la compagnie « Amirante Fisheries» qui se situe dans la zone industrielle de Providence, à environ trois kilomètres au sud de Victoria, la capitale des Seychelles, a été la première entreprise dans l'archipel à cibler les prises accessoires dans le but de maximiser les rendements de "l’économie bleue".
C’est un concept que les Seychelles s’emploient activement à promouvoir au sein de la région et au-delà tout en invitant à développer davantage les activités locales connexes liées à l'océan.
Lors de la célébration de la journée nationale des Seychelles, qui a coïncidé au 39eme l'anniversaire de l'indépendance, l'entreprise, appartenant à James Lesperance, a attiré des milliers de visiteurs sur son stand d'exposition au Salon national qui a eu lieu le week-end dernier.
Lesperance fait partie d’un groupe d'entrepreneurs seychellois dans le secteur de la pêche,qui se sont vus attribués des unités de transformation de poissons pour générer de la valeur ajoutée aux poissons, en aout 2014, dans la zone industrielle de Providence, sur des terres asséchées au sud de la capitale.
L'installation se compose de trois usines de transformation de poissons avec trois unités chacune. Cette dernière a été financée dans le cadre du Programme de développement sectoriel de la pêche Seychelles-UE pour un coût avoisinant 2,5 millions de dollars US. Une grande partie des fonds a permis de démarrer la production.
Un employé de la compagnie Amirante Fisheries découpant le poisson à transformer. L'entreprise exporte actuellement divers types de poissons au Sri Lanka, en Inde, en Afrique du Sud, au Ghana ainsi qu’au Bénin. (Joe Laurence, Seychelles News Agency) Licence photo : CC-BY |
En dehors de l'exportation de poissons, certains sont également vendus localement ; par exemple, le Marlin est nettoyé et vendu à Oceana Fisheries, l'une des plus anciennes entreprises de pêche des Seychelles, qui le fume pour le marché local, en particulier pour l'industrie hôtelière.
Lesperance est aussi constamment à la recherche de nouveaux moyens d'augmenter la valeur ajoutée de ses produits issus de la pêche. Lors de l’exposition nationale, parmi ses derniers produits phares ont été exposés différents types de chutneys, mélanges de poissons et de divers fruits locaux.
Les principaux fruits utilisés sont les mangues, la papaye et le fruit Cythère qui sont tous disponibles localement, ce qui apporte un goût différent à chaque chutney.
Lesperance a déclaré à la SNA que la pulpe des fruits constitue 10 pour cent du mélange, les feuilles de curry et la cannelle ajoutent une saveur tropicale. Environ 80 pour cent des chutneys de poissons sont destinés au marché de l'exportation.
Amirante Fisheries vise une production mensuelle de 100 tonnes.
« Ces initiatives sont toutes récentes. Nous sommes toujours à 40 pour cent de notre objectif et toujours en train d’établir nos marchés,» a déclaré Lesperance.
Amirante Fisheries dispose d’un effectif de 12 personnes et il n’est pas rare pour eux de travailler 24 heures sur 24 jusqu'à 5 heures du matin le jour suivant pour nettoyer une cargaison de prises accessoires.
« Nous devons travailler vite et nettoyer chaque cargaison sans interruption. Sinon, le poisson sera avarié et inutile. »
Quelques produits de Amirante Fisheries qui sont soit exportés soit vendus localement. (Patrick Joubert, Seychelles News Agency) Licence photo : CC-BY |
Selon l’Autorité de pêche des Seychelles, SFA, la majorité des prises accessoires en provenance des 40 senneurs pour la plupart français et espagnols opérant dans le port de Victoria aux Seychelles étaient gaspillés jusqu'à cette année.
Le poisson, notamment le thon listao sous-dimensionné n’est pas utilisé pour les conserves. Les bonites, dorades, marlins, carangues, requins soyeux, carangues arc-en-coureurs ainsi que les wahoos constituent environ cinq pour cent de la pêche des senneurs.
Vincent Lucas, le chef de la direction par intérim de l’Autorité de pêche des Seychelles (SFA), a déclaré à la SNA que cela représente pour chaque senneur de retour au Port de Victoria, avec une pleine cargaison, entre 25 et 40 tonnes de poissons. La capacité de ces navires de pêche varie entre 1000 et 1200 tonnes.
Après avoir été attrapés dans des grands filets et séparés du thon, quelques poissons étaient tout simplement rejetés à la mer, tandis que d'autres, comme notamment les requins avaient leurs ailerons coupés et séchés pour l’export et les carcasses étaient tout simplement rejetées à l’eau.
« Bien que d'autres prises accessoiressoient recherchées par les usines de transformation de poissons, il est maintenant illégal de rejeter du thon en mer, » a déclaré Lucas dans une interview accordée à la SNA.
Des caméras ont également été installées sur les senneurs, appartenant pour la plupart à des Français et à des espagnols, pour surveiller leurs opérations de pêche.