Comores: une présidentielle partielle susceptible de faire basculer les résultats
Des voteurs comoriens lors du deuxième tour de l'élection présidentielle (IBRAHIM YOUSSOUF / AFP)
(AFP) - Les Comores connaissent une situation inédite avec la réorganisation partielle mercredi de la présidentielle dans des bureaux où le second tour avait été perturbé, un nouveau scrutin susceptible de changer les résultats très serrés du vote remporté par l'ex-putschiste Azali Assoumani.
Seuls 6.305 électeurs, soit 2% des quelque 300.000 que compte cet archipel pauvre de l'océan Indien à l'histoire politique tumultueuse, sont appelés aux urnes mercredi dans 13 bureaux de vote, mais ils sont en mesure de faire basculer les résultats de la présidentielle.
Selon les résultats provisoires, l'ex-président Azali Assoumani (1999-2006) est arrivé en tête avec 40,98% des suffrages, suivi du candidat du pouvoir sortant, Mohamed Ali Soilihi dit "Mamadou" (39,87%), et du gouverneur de l'île de la Grande-Comore, Mouigni Baraka (19,15%).
Quelque 2.000 voix seulement séparent le colonel Assoumani de "Mamadou".
Le second tour, le 10 avril, avait été marqué par des "irrégularités et de graves actes de violences" qui ont empêché 6.305 électeurs d’exprimer leur vote, selon la Cour constitutionnelle qui a ordonné l'organisation d'une présidentielle partielle dans 13 bureaux de vote.
Le colonel Assoumani a dit "aborder avec sérénité" ces élections partielles, qui se dérouleront uniquement à Anjouan, l'une des trois îles de l'Union des Comores.
"Mamadou", à qui la Cour constitutionnelle a partiellement donné raison, s'est déclaré "plus combatif et encore plus optimiste" que jamais sur l'issue du scrutin, dans une interview à l'AFP dimanche.
Il s'est toutefois dit "inquiet du climat de campagne marqué par la surenchère" et a déploré "les propos belliqueux" du camp Assoumani. "J'espère que les dispositions pour la sécurisation du scrutin seront suffisamment dissuasives" pour éviter les débordements, a-t-il ajouté.
Preuve des tensions à Anjouan, le chef d'état-major, Youssouf Idjihadi, s'est rendu lundi sur l'île, accompagné d'une demi-douzaine d'officiers, a constaté un journaliste de l'AFP.
En vue de la partielle, la présidente de la Commission de l’Union africaine (UA), Nkosazana Dlamini-Zuma, a appelé les "candidats présidentiels et leurs partisans (...) à se montrer la hauteur des attentes du peuple" comorien et à "éviter la violence".
- Coup de théâtre -
Le scrutin du 10 avril avait été émaillé d'incidents (interruption du scrutin, bourrage d'urnes, actes de violences...), notamment à Anjouan. Des membres du Centre européen d'appui électoral (ECES) avaient dû quitter l'île précipitamment, à la suite à de menaces de mort selon eux.
La nouvelle campagne a été de très courte durée - du 3 au 9 mai - et s'est déroulée uniquement à Anjouan.
Elle a été marquée par un coup de théâtre: le candidat arrivé en troisième position, Mouigni Baraka, a jeté l'éponge, se ralliant à "Mamadou".
Son nom, peu connu à Anjouan, figurera sur les bulletins car il ne peut juridiquement se retirer d'une partielle, mais il a appelé à voter "Mamadou" et a participé à plusieurs de ses meetings ces derniers jours à Anjouan.
Le colonel Assoumani bénéficie lui du soutien d'un ancien président, le charismatique Ahmed Abdallah Sambi, originaire d'Anjouan.
Azali Assoumani avait surgi sur la scène politique en 1999 lors d'un putsch, avant d'être élu président en 2002 et de céder le pouvoir en 2006 en vertu de la nouvelle Constitution. Ses détracteurs se font un plaisir de rappeler qu'il avait abandonné en 1995 ses hommes, en plein affrontement avec une dizaine de mercenaires conduits par le Français Bob Denard, pour se réfugier dans l'enceinte de l'ambassade de France à Moroni.
"Mamadou", actuel vice-président de l'Union des Comores, occupait lui, avant de se lancer dans la campagne présidentielle, le stratégique portefeuille du ministère de l'Economie. A ce poste, il a obtenu en 2013 l'annulation de la dette comorienne à hauteur de 85%.
En dépit de l'organisation de la présidentielle partielle, la Cour Constitutionnelle a maintenu au 26 mai l'investiture du nouveau président.
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