Le pain traditionnel français fait son grand retour aux Seychelles
Le pain rond fabriqué traditionnellement, avec une belle croûte et sa mie tendre
( Joe Laurence, Seychelles News Agency)
(Seychelles News Agency) - Au même titre que le vin ou le fromage, le pain est un des aliments de base traditionnel du repas français. Avec sa croûte dorée et croustillante et sa mie de pain blanche et moelleuse, la baguette fait le bonheur des petits et des grands.
Depuis bientôt deux ans, la traditionnelle baguette française, et d’autres pains ont fait leurs retours sur l’archipel de 115 îles de l’Océan Indien. C’est dans la zone industrielle, sur la côte est de Mahé, l’île principale des Seychelles, que Murielle Devals, une femme d’affaire seychelloise passionnée de gastronomie française, a décidé de créer, une boulangerie pâtisserie, la Mie de Pain.
Grâce au savoir-faire de ses boulangers et de ses pâtissiers et à une rigoureuse sélection des matières premières, la Mie de Pain a conquis tous les adeptes et gourmets de la boulangerie-pâtisserie artisanale française.
La SNA a rencontré Murielle Devals pour savoir comment lui était venue l’idée d’avoir sa propre boulangerie.
SNA : Qu’est-ce qui vous a incité à ouvrir une boulangerie française aux Seychelles ?
Murielle : Avant de connaître mon mari, je travaillais au port de pêche avec des Thoniers Français qui emmenaient leurs fruits et leur farine et ils faisaient leurs propres pains sur les bateaux.
C’est de cette manière que j’ai découvert le pain et que j’ai appris à apprécier les bonnes pâtisseries. Puis j’ai rencontré mon mari, Patrice, qui est Français originaire de Bretagne, et je suis partie vivre en France. C’est comme cela qu’est née ma passion pour le pain et la pâtisserie.
Cela faisait 20 ans que j’avais envie de créer cette boulangerie car c’était une des choses qui manquait le plus aux Seychelles. Ce qui permet aussi aux expatriés d’acheter du bon pain français et de la bonne pâtisserie.
SNA : Comment ont réagi les clients face à l’arrivée de cette nouvelle boulangerie ?
Murielle : les gens aiment bien et ils ont très bien réagi. Ils ont dit que ça faisait longtemps qu’ils attendaient une bonne boulangerie française.
SNA : Quelle est la proportion de votre clientèle Seychelloise ?
Murielle : Je peux dire qu’en moyenne la clientèle Seychelloise représente 50 pourcent de nos clients. On a à la fois une clientèle de Seychellois et une clientèle d’expatriés. Ça dépend des jours. Les seychellois aiment beaucoup le bon pain et les bons gâteaux. On a beaucoup de commande de gâteaux d’anniversaire et de gâteaux de mariage.
Une variété de gâteaux vendus à la boulangerie Mie de Pain ( Joe Laurence, Seychelles News Agency) Photo License: CC-BY |
SNA : Quelle est votre typologie de clientèle ? Est-ce que vous avez des clients réguliers ?
Murielle : D’une manière générale nos clients sont des particuliers. Mais on a aussi quelques hôtels et restaurants qui nous demandent de la pâte feuilletée ou des viennoiseries. Les loueurs de bateaux viennent également nous acheter du pain frais pour mettre à disposition de leurs clients.
J’ai beaucoup de clients habitués qui viennent acheter leur pain tous les jours.
SNA : Est-ce que tous vos produits sont fabriqués artisanalement ?
Murielle : Nous fabriquons tous les pains et les pâtisseries nous-même. On fait l’effort permanent de choisir des ingrédients de qualité pour confectionner nos pains et nos gâteaux. Tout ce qu’on importe arrive par avion pour que les produits restent très frais ou bien on se fournit chez ISPC. Hormis la farine qui est importée par container maritime tout le reste des produits, tels que le beurre, la crème, le chocolat… arrive par avion.
De plus, vu que nous n’avons pas d’espace de stockage réfrigéré suffisant, on est obligé d’importer en petite quantité pour maintenir la qualité optimale des produits, ce qui augmente bien sûr les coûts de transport.
Les seuls produits locaux qu’on achète sont les œufs et la salade.
SNA : La farine étant un des produits de base pour la confection du pain, laquelle avez-vous choisi pour votre boulangerie ?
Murielle : Ce qu’on a fait c’est qu’on a choisi une farine chez un meunier en France, on a envoyé 800 grammes de cette farine par DHL dans une usine à Dubaï et on l’a faite analyser dans un laboratoire. A l’heure actuelle on a notre farine française qui est spécialement fabriquée pour nous.
SNA : Quels sont les produits préférés de la clientèle ?
Murielle : (sourire) Tout le monde vient pour la baguette. 80 pourcent de mes clients achètent la baguette.
Bien qu’on fabrique toutes les sortes de pains spéciaux, tels que le pain pour les personnes diabétiques, du pain pour les personnes qui ont problèmes de cholestérol, le pain complet, etc., le pain favori reste la baguette.
Au niveau pâtisserie, ce qui se vend le mieux c’est les tartes aux fruits, les millefeuilles et les éclairs aux chocolats.
SNA : Quelle est la dernière demande originale que vous avez eue d’un client ?
Murielle : A l’heure actuelle, on a un gâteau de mariage qui va partir sur Denis Island. C’est un couple de Réunionnais qui nous a contactés pour qu’on leur confectionne leur gâteau et ensuite on va le faire envoyer par hélicoptère.
Un boulanger français travaille dans le magasin pour former les seychellois au métier de pâtissier et à la préparation des gâteaux. ( Joe Laurence, Seychelles News Agency) Photo License: CC-BY |
SNA : Avec une baguette à 17 roupies, vous pratiquez des prix comparables voire supérieurs à ceux de la France, est ce que vous comptez baisser les prix ?
Murielle : La différence c’est qu’en France on trouve tout sur place, ici on est obligés de tout importer. Compte tenu du climat, on est obligé de conserver nos produits à l’abri de la chaleur et de l’humidité, dans des locaux réfrigérés. On ne peut pas vendre le pain moins cher.
SNA : Quel est le plus gros défi au quotidien pour monter une boulangerie aux Seychelles ?
Murielle : La fiabilité du personnel.
Tous mes boulangers Seychellois qui sont bons ils démissionnent ou ils partent. Car, même si ils savent qu’ils doivent travailler le lendemain, Ils vont boire et faire la fête… le lendemain ils ne viennent pas travailler pendant 2 à 3 jours.
Mes boulangers ont une journée et demie de repos par semaine et tous les congés publics… Au niveau horaire, ils arrivent à 4h00 du matin et à 13h00 ils ont terminé leurs journées.
Au niveau salaire, ils sont mieux payés que dans des hôtels 5 étoiles aux Seychelles.
Vu qu’on ne peut pas compter sur eux, je suis obligé d’embaucher plus d’expatriés. Je leur fournis le transport et le logement en plus de leur salaire, car ils viennent de l’extérieur. Et forcément ça impacte le coût de mes produits.
Moi, j’aimerais embaucher et former plus de Seychellois… je suis prête à donner un bon salaire, mais ils ne veulent pas travailler…
La boulangerie "Mie de pain dans la zone industrielle de Providence ( Joe Laurence, Seychelles News Agency) Photo License: CC-BY |
SNA : Actuellement, combien de personnes embauchez-vous à la Mie de Pain ?
Murielle : J’ai un boulanger français et un boulanger seychellois, un pâtissier français et une pâtissière seychelloise, 1 commis et 3 caissières.
Afin de conserver la qualité de notre pain français, j’ai toujours un boulanger français qui forme et travaille avec un boulanger seychellois.
SNA : Tout au long de l’année, vous avez organisé différentes opérations commerciales pour célébrer Noël, la galette des rois, etc., est ce que vous avez rencontré le succès escompté ?
Murielle : C’est la première fois, cette année qu’on faisait la galette des rois. J’ai fait venir tous les ingrédients, les couronnes et les fèves de France. Malheureusement, ça ne s’est pas aussi bien vendu qu’on l’espérait. Mais je sais très bien aussi que les Seychellois ne connaissent pas la galette, ce n’est pas la coutume ici. Donc j’en ai vendu beaucoup aux expatriés.
C’est vrai que la galette était un peu chère. Le problème c’est que pour fabriquer la galette il faut beaucoup de beurre et de poudre d’amande. Et tous ces produits importés coûtent extrêmement cher. On a réfléchi pour faire les choses différemment l’année prochaine pour essayer de faire plaisir à tout le monde.
En revanche pour les fêtes de fin d’année, les gâteaux de Noël ont très bien marché. Tous les seychellois veulent un dessert pour Noël.
SNA : La boulangerie étant un métier à part entière, est-ce que vous aviez fait une formation au préalable avant de monter votre boulangerie ?
Murielle : Vous savez, quand on a commencé le business, j’étais seule à tout gérer, il fallait bien que je m’y mette à fond. J’avais tellement envie de faire cette boulangerie, que j’ai tout appris sur le tas.
SNA : En tant que femme d’affaire expérimentée, est-ce que vous êtes satisfaite de la rentabilité de la boulangerie ?
Murielle : Je vais être honnête, la boulangerie ne me rapporte pas d’argent. Pour l’instant on ne peut que prendre les recettes pour réinvestir. Et j’espère de tout cœur que d’ici 2 ans je vais commencer à amortir mes investissements.
Murielle Devals, une femme d’affaire seychelloise passionnée de gastronomie française, ( Joe Laurence, Seychelles News Agency) Photo License: CC-BY |
SNA : Avez-vous d’autres projets pour la Mie de Pain ?
Murielle : D’ici un an et demi j’aimerais trouver un terrain dans une zone industrielle pour faire construire mon propre immeuble qui logera ma boulangerie, mon entrepôt et une chambre froide. En faisant arriver la marchandise par container complet, cela devrait faire diminuer les coûts de transport, on essaiera de diminuer nos prix de vente sur les pâtisseries. L’objectif est de donner toujours plus de qualité et de quantité pour nos clients expatriés et seychellois.
De plus, on a réservé un emplacement en ville à côté du Butchers Grill pour que les gens puissent acheter leur pain en ville et prendre un café croissant le matin.
Dans le même temps, on va commencer à développer également un service de livraison pour approvisionner certains quartiers de l’île de Mahé et certains hôtels.