Comores: l'ex président Sambi absent à son procès pour trahison
L'ancien président comorien Ahmed Abdallah Sambi (2e R), escorté par des gendarmes, arrive au palais de justice de Moroni le 21 novembre 2022. Sambi, qui a été président de 2006 à 2011 et qui est le principal opposant du dirigeant actuel Azali Assoumani, est assigné à résidence depuis mai 2018. (Photo : Ibrahim YOUSSOUF / AFP)
(AFP) - "Pas de garanties d'un procès équitable": L'ancien président comorien Ahmed Abdallah Sambi, 64 ans, ne s'est pas présenté mardi devant la Cour de sûreté de l'Etat qui le juge pour "haute trahison", estimant la procédure biaisée.
Ses cinq avocats n'y ont pas non plus assisté, préférant tenir une conférence de presse à Moroni: "Nous avons quitté l'audience parce que nous ne disposions pas de garanties d'un procès équitable", a expliqué l'un d'eux, Mahamoudou Ahamada.
Ouvert lundi, ce procès contre l'ancien président (2006-2011) de l'archipel de l'océan Indien, et principal opposant de l'actuel chef d'Etat Azali Assoumani, porte sur un scandale dit de la "citoyenneté économique", impliquant la vente de passeports comoriens à des apatrides des pays du Golfe.
M. Sambi, courte barbe blanche et boubou bleu, était apparu affaibli lundi à l'audience. Il a déjà passé plus de quatre ans en détention provisoire alors que la limite légale est fixée à huit mois.
Le verdict sera connu "au plus tard" jeudi, a confirmé à l'AFP le commissaire du gouvernement Ali Mohamed Djounaid, qui joue le rôle de procureur au procès.
L'avocat belge Jan Fermon, qui défend aussi M. Sambi, a dénoncé "une cour qui n'a pas d'existence légale" et devant laquelle "aucun procès équitable n'était possible".
Lundi à l'audience, la défense avait demandé au président de la Cour, Omar Ben Ali, de se récuser pour avoir siégé au sein de la chambre d'accusation lors de l'instruction. Demande rejetée par l'intéressé lui-même, arguant - de manière étonnante - qu'il n'avait pas connaissance du fond de l'affaire.
La conférence de presse a par ailleurs pris une tournure inattendue: L'avocat français Jean-Gilles Halimi y a accusé deux ministres d'avoir tenté d'extorquer un faux témoignage auprès d'un autre prévenu, l'homme d'affaires franco-syrien Bachar Kiwan.
"Compte tenu que le dossier d'instruction n'apporte aucune démonstration de la culpabilité de mon client, des ministres ont tenté de corrompre" un des accusés "afin qu'il vienne témoigner contre Sambi en échange d'une grâce", a affirmé Me Halimi, citant le ministre des Affaires étrangères Dhoihir Dhoulkamal et le porte-parole du gouvernement, Houmed Msaidie.
M. Kiwan avait déjà publié la veille un communiqué affirmant que le gouvernement comorien lui avait proposé "un arrangement à l'amiable" contre son témoignage sur son rôle dans le scandale.
M. Msaidie, mis en cause par des échanges WhatsApp qui circulent sur les réseaux sociaux, le présentant comme l'auteur d'une offre de grâce auprès de M. Kiwan, dément énergiquement. "Ce n'est pas mon compte, ce n'est pas moi", a-t-il affirmé à l'AFP.
Bachar Kiwan, contacté par l'AFP, affirme au contraire que ces échanges sont authentiques et dit avoir rencontré le ministre des Affaires étrangères "à trois reprises, la dernière fois il y a quelques semaines" dans un hôtel chic à Paris pour "trouver un arrangement amiable" dans cette affaire.
Il assure avoir été en contact avec six membres influents du régime. "Les échanges étaient au début courtois mais sont devenus très vite menaçants", a-t-il avancé.
Le ministre comorien des Affaires étrangères a confirmé à l'AFP ces rencontres, précisant qu'elles avaient eu lieu à l'initiative de M. Kiwan et démentant leur teneur telle qu'avancée par l'homme d'affaires.
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